Précaires de réserve

Publié le par Parti Communiste Français section Eu le Tréport

Les quartiers dits sensibles cristallisent les conséquences des politiques de casse sociale.
Maurice Leroy, tout nouveau ministre de la Ville et content de l’être, a-t-il seulement lu le rapport qui lui a été remis officiellement hier, mais connu depuis la semaine dernière, par l’Observatoire national des zones urbaines dites sensibles ? Un terme pudique pour désigner les quartiers qui subissent les effets, d’une brutalité inouïe, d’une société violemment inégalitaire. La présentation à la presse hier de ce rapport par le ministre ressemblait à un conte de Noël : « Les conclusions du rapport de l’Onzus confirment l’approche du gouvernement. » À cela près que Maurice Leroy, peu avare de propos aussi généraux que généreux, s’est bien gardé d’évoquer si peu que ce soit « l’action » de celle qui l’avait précédé sur ce terrain, ce que l’on peut comprendre. Le plan Marshall des banlieues n’aura vécu que le temps d’une campagne électorale et le secrétariat d’État de Fadela Amara, quand bien même elle aura essayé de se persuader du contraire, fut pendant plus de deux ans aux abonnés absents.
Mais il n’empêche, non seulement Maurice Leroy discerne dans la situation « des évolutions positives », mais il se sent investi d’une grande mission avec « un ministère de plein exercice voulu par le président de la République Nicolas Sarkozy et le premier ministre François Fillon ». Ceci pour les salamalecs. Le problème, c’est que la situation que décrit le rapport est catastrophique, quelles que soient les précautions de langage que l’on peut relever ici ou là. On a retenu, déjà, le chiffre effarant des 43 % de jeunes hommes au chômage, mais on pourrait parler de la santé, de la baisse de plus de 10 % du nombre d’enseignants dans le secondaire, de la situation des femmes d’origine étrangère, de la spirale de la précarité…
Face à cela, qu’avance le ministre ? Rien, ou si peu et ce peu, est dérisoire. « Mon ambition est de faire en sorte que les crédits de l’Agence de cohésion sociale arrivent sur le terrain. » Même chose, affirme-t-il, pour les subventions aux associations. On sait ce qu’il en est et que ce n’est pas le cas, au contraire. Mais quand bien même cela serait, il ne s’agirait que de saupoudrage, car la question des quartiers sensibles n’est pas plus une question à traiter en annexe de la politique générale du gouvernement que ces quartiers ne sont aux marges de la société. C’est tout le contraire. Ils cristallisent les conséquences des politiques menées en termes de casse sociale, de mise en cause des services publics, d’emploi et de mise en pièces du Code du travail, de logement, de bas salaires… Bien sûr, il y faut des crédits, mais il y faut un changement profond de perspective. Il faut mettre ces quartiers au centre de politiques qui renouent avec le progrès social. Le gouvernement le veut-il ? On peut en douter. C’est là que se trouvent, pour reprendre une idée de Marx, ses armées de précaires de réserve.


Maurice Ulrich

Publié dans Actualité

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